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De Mogadishu à Montréal : La musique à l’origine de la séparation et des retrouvailles de Deeqa et sa famille

Après plusieurs mois de disparition, j’étais ravie de croiser Deeqa par hasard; connaissance de longue date et chanteuse de reggae connue dans la scène locale. Durant notre brève rencontre et à ma grande surprise, elle m’a appris qu’elle venait de reprendre contact avec sa famille qu’elle n’avait pas revue depuis près de 20 ans ! Intriguée par cette confession surprenante, j’ai répondu, très naïvement : « 20 ans ? Wow ! » C’est à ce moment que je me suis demandée : Comment a-t-elle perdue trace de sa famille et comment se fait-il qu’elle n’ait pas été capable de les revoir pendant près de deux décennies ? C’est alors que j’ai recollé les morceaux en concluant que Deeqa, étant Somalienne, aurait perdue contact avec sa famille à la suite de la guerre civile des années 90. Deux semaines plus-tard, nous nous sommes rencontrées pour parler de son histoire de vie, ce que c’était que de grandir dans la très belle ville côtière de Mogadishu, à son arrivée au Canada alors qu’elle était encore mineure.
Deeqa fait preuve d’un extraordinaire talent pour la musique, et ce, dès son plus jeune âge et a même eu l’occasion de chanter pour le président de son pays. Elle a aussi été invitée par son professeur de musique, en tournée avec d’autres étudiants en musique. Accompagnée de son professeur et de ses camarades de chorale, Deeqa a quitté la maison pour aller en voyage, pour une durée déterminée. Et par malheur, durant son absence, la guerre éclata en Somalie et ce qui fit qu’elle ne puisse retourner à Mogadishu à cause d’un barrage routier. Tout son groupe a été contraint de fuir par bateau pour le Kenya. Là, ils ont été reçus par les membres de Médecins Sans Frontières. Après avoir vécu dans un camp de réfugiés pendant quelques temps, elle a été envoyée à Saskatoon Saskatchewan grâce à des bénévoles français. Elle y a passé le reste de son adolescence, a appris l’anglais et a obtenu un diplôme en Éducation.
Depuis qu’elle a quitté la Somalie, Deeqa a désespérément essayé de bâtir un « chez-soi » au Canada. Malgré ses nombreuses années passées au Canada, son cœur et son âme restent très liés à son pays d’origine. Cette connexion s’est renforcée, il y a deux mois par une série d’événements miraculeux qui lui permettent de retrouver sa famille à Mogadishu. Depuis qu’elle a quitté la Somalie au début des années 90, elle n’avait eu aucune nouvelle de sa famille jusqu’au début de cette année, lorsqu’elle a reçu un appel de son neveu en Angleterre qui était tombé sur un vidéo clip de Deeqa sur youtube. Et quelques temps après, elle eut la chance de finalement parler à toute sa famille au téléphone.
Deeqa explique cet hasard en disant ; « c’est la musique qui m’a enlevée à ma famille mais c’est aussi la musique qui m’a aidé à la retrouver ». La musique a joué un rôle majeur dans la vie de Deeqa. Malgré le fait qu’elle habite au Canada, loin de sa famille, de ses amis et de sa terre natale, la musique est la seule chose qui lui apprend à persévérer quand elle veut baisser les bras, qui lui donne l’espoir dans les moments difficiles, et qui lui a permet de rester positive dans les moments de solitude. Grâce à la musique, elle a réussi à maintenir une connexion avec ses racines culturelles tout en bâtissant de forts liens d’amitié au Canada.
Bien qu’il soit clair que Deeqa ait été émotionnellement affectée par certains des défis auxquels elle a dû faire face en tant que jeune réfugiée venue dans ce pays toute seule, elle a dû travailler fort afin de profiter pleinement de toutes les occasions qui lui sont tendues et souhaite un meilleur avenir pour elle et sa famille. C’est cette force et cet optimisme qui m’ont inspiré et qui, j’en suis sûre, vont lui permettre de retrouver sa famille. D’ici quelques mois, elle espère pouvoir retourner en Afrique, pour la première fois, après un long séjour loin de sa patrie.
Écrit par: Gracia Dyer Jalea

Entrevue avec Empress Deeqa Ibrahim

Réalisée: Mercredi 14 avril, 2010
Intervieweur: Gracia Dyer Jalea

Vidéographe: Liz Miller